Thursday, 5 January 2012

En 2012, les Restos ne désemplissent pas

Leur 27ème campagne entamée, les Restos du cœur sont plus sollicités que jamais. Situé dans le 19e arrondissement de Paris, le site de la porte de la Villette opère quotidiennement pour distribuer nourriture et réconfort aux plus démunis, dont le nombre ne cesse d’augmenter. Une soixantaine de bénévoles mettent ainsi du cœur à l’ouvrage au milieu de la grisaille parisienne. 


Une petite foule est rassemblée ce mercredi 4 janvier devant les préfabriqués du centre de distribution des Restos du cœur de la Porte de la Villette, à Paris. Impossible de distinguer cet établissement situé à quelques pas du périphérique, à moins d'emprunter l'allée jonchée de verres en plastique et autres déchets qui y conduit. Comme beaucoup, Mehdi, Tunisien âgé de 27 ans et sans travail depuis trois mois, profite d'un café offert dans le local exigu jouxtant le réfectoire. Ils sont une dizaine à s'y réfugier, « pour passer le temps et ne pas être seul ». Une grand-mère et son petit-fils y patientent, en attendant de pouvoir solliciter les « restos ». Une aide bienvenue pour cette sexagénaire dotée d’une maigre retraite. « C'est difficile d'en parler », avoue-t-elle. A l'extérieur, la file d'attente stagne. Depuis une heure, nombre de femmes accompagnées de leur enfant espèrent obtenir le fameux colis avec lequel elles rempliront leur cabas. Lait, beurre, café, steak hachés, conserves et produits d'hygiène leurs seront distribués en fonction des difficultés financières de chacune.

De plus en plus de femmes ont besoin d'aide

"Cette année j'ai vraiment ressenti l'augmentation du nombre de femmes seules dans le besoin. Elles travaillent souvent à mi-temps ou touchent le RSA et viennent de plus en plus chez nous", déplore Raymonde Fernandez, 69 ans, responsable du centre de la porte de la Villette. Bénévole aux restos depuis 16 ans, elle regrette la longue vie de cette association, reflet d'une misère qui n'est pas "près de s'éteindre". Mais elle se réjouit de pouvoir apporter son soutien. "Je n'ai aucun mérite, ça me plait d'œuvrer ici", estime-t-elle avec un sourire bienveillant qui ne la quitte presque jamais. Les bénévoles frappent régulièrement à sa porte, pour savoir « où sont les clés des locaux » ou si « la coiffeuse viendra demain ». « Oui, de bonne heure. Elles seront deux et s’occuperont de quatre hommes chacune ».

Raymonde aime souligner que les restos, « ce ne sont pas que des repas : coiffure, activités culturelles, soutien aux mères d'enfants en bas âge à travers les restos bébés, chantiers de réinsertion » comptent parmi les nombreux dispositifs mis en place pour venir en aide aux plus démunis. Et ces derniers sont de plus en plus nombreux. En 2011, le centre de la porte de la Villette recensait près de 1800 familles inscrites en fin de campagne, un chiffre qui s'élève déjà à 1300 en ce début d'année. « Heureusement que les Français sont très généreux et que le programme d'aide européen(PEAD) a été sauvé » affirme Raymonde, ravie du succès de l'appel d’Olivier Berthe, le président des Restos du cœur.

"Beaucoup de moments touchants"

Ce 4 janvier, 350 repas chauds ont été servis dans la cantine où trône toujours un modeste sapin de noël. Des ballons accrochés au plafond viennent égayer les lieux, tout comme les rires des bénévoles. Certains sont eux-mêmes dans le besoin, mais viennent « donner un coup de main, pour se sentir utile et se fixer des horaires ». Fred, plongeur guadeloupéen au service des Restos depuis deux ans, taquine Elodie : « Mais qu'est-ce que tu fais ici ? Tu es journaliste? » . A peine majeure, la jeune fille fait partie des 18 personnes sélectionnées par l'aumônerie œcuménique des écoles du Jura, un organisme religieux basé en Suisse, pour apporter son aide aux Restos du cœur, du 2 au 6 janvier. "C'est une expérience vraiment enrichissante, pleine d'émotions. Ça peut paraître naïf mais c'est super de recevoir tant de sourires. On passe beaucoup de moments touchants. Par exemple, l'un des bénévoles n'arrête pas de demander aux bénéficiaires comment on dit 'bonne année' dans leur langue. Ça leur fait plaisir." Nul doute que ces vœux sincères sont bien reçus, quand ils sont alliés au geste.