Thursday, 22 March 2012

Des adeptes de foot gaélique à Aubervilliers

  

Peu connu en France, le football gaélique, emblème national irlandais, rassemble de rares adeptes dans l’Hexagone. Créé en 1994 par des expatriés, le club Paris Gaels cherche à se développer, sans subventions. Contrant une faible visibilité, la convivialité est reine au sein de cet ovni du paysage sportif français. 

Tous les lundis soir, un drôle d’entraînement a lieu sur le stade du complexe sportif de l’ASPTT d’Aubervilliers (93). Les ballons ressemblent à des balles de volley, les joueurs dribblent tous les quatre pas, boxent la balle ou tirent au pied en visant leurs camarades ou des poteaux de rugby. Tous s’adonnent au football gaélique, le sport préféré des Irlandais.

Ce soir-là, l’équipe féminine rassemble douze personnes sur une moitié du terrain, tandis que sur l’autre, un peu moins de vingt jeunes hommes s’entrainent, cernés par les barres d’immeubles surplombant le stade. Parfois, quelques amateurs de football traditionnel s’arrêtent pour les regarder, étonnés.

Une dynamique internationale

« Quand le club a été créé en 1994, il rassemblait surtout des expatriés irlandais. Mais nous avons de plus en plus de Français dans l’équipe masculine, ils deviennent même majoritaires » explique Eileen Jennings. Cette Irlandaise de 32 ans vit à Paris depuis 2004. Pratiquant le football gaélique depuis le plus jeune âge, elle est désormais présidente du club parisien et coach de l’équipe féminine. Elle se réjouit de la dynamique internationale des Paris Gaels, où l’on trouve des Irlandais, des Français, mais aussi des Canadiens, des Australiens, des Allemands…

Alexandre, 25 ans, a rejoint les Paris Gaels il y a deux ans. « C’est mon collègue, Florian, le coach, qui m’a donné envie de venir jouer avec lui. ». Originaire de Haute-Savoie, Alexandre remarque que peu de « Parisiens pure souche » composent l’équipe. « Nous sommes tous des expats à notre façon ». 
Le plus souvent, les joueurs ont découvert le sport en Irlande, auprès de leurs amis, « ou lors de la Saint Patrick ! ».

Malgré la proximité des entrainements qui se tiennent au même endroit depuis la fondation du club il y a presque vingt ans, aucun habitant d’Aubervilliers n’est, à l’heure actuelle, membre du club. « Le problème, c’est que ce sont les enfants qui sont attirés par le foot gaélique. Ils sont intrigués à force de nous voir jouer et ont envie d’essayer, mais nous n’avons pas encore l’agrément jeunesse », déplore Eileen.

La convivialité à la rescousse du manque de moyens

Depuis sa création en 2006, la fédération française de foot gaélique compte aujourd’hui seize clubs dans le pays, mais la discipline reste essentiellement cantonnée à la Bretagne. « La compétition n’est pas le plus important. Ce qui fait la force du club, c’est vraiment la convivialité qui y règne » assure Eileen. « Nous organisons très souvent des soirées dans notre QG, le pub Coolin à Paris. Nous avons aussi une vocation sociale. Nous aidons des expatriés irlandais à trouver un logement ou un job, surtout quand on veut les garder dans l’équipe », confie-t-elle, en riant.

Le club parisien, qui regroupe aussi les équipes de hurling et de camogie, autres sports gaéliques, recense entre 70 et 80 licenciés. Sans subventions et sans grande visibilité, il doit se battre pour exister. La location de l’ASPTT, un complexe privé, coûte dix fois plus cher que ce qui s’offre généralement aux associations sportives à Paris.

 « Nous organisons des marathons pour récolter de l’argent. De nombreux pubs irlandais ou encore des sociétés comme Guinness ou Kronenbourg nous aident financièrement. Ainsi, la cotisation pour les membres de l’équipe n’est que de 50 euros pour l’année. Cela permet également d’alléger le coût des trajets pour les matchs, qui ont lieu en province ou à l’étranger (ndlr : des matchs sont organisés entre les 16 clubs français ou en Euroligue, contre d’autres clubs d’Europe continentale)». Les infrastructures françaises ne sont pas adaptées au football gaélique, alors il faut ruser. Récemment, le ministère des affaires étrangères irlandais a fourni  au club des poteaux et des cages amovibles, pour les matchs.

Après deux heures d’entraînement, filles et garçons se rejoignent et se dirigent vers les vestiaires, en se taquinant, en anglais ou en français. Tous attendent avec impatience le stage d’initiation aux sports gaéliques organisé à Aubervilliers les 24 et 25 avril prochain. L’occasion, peut-être, d’attirer de nouvelles recrues dans leurs filets…